Geneviève raconte
« Merci encore pour cette belle rencontre. C’est bien la première fois que je parle autant de moi ! » m’écrit Ana*. Ce message touchant fait suite à un patient tissage de relations de confiance et d’amitié. Pour un de mes reportages, j’avais proposé à Ana* de l’interviewer sur un sujet qui lui tenait à cœur. Très intimidée, elle avait d’abord refusé puis accepté de lire son texte. Mise en confiance, elle s’est surprise à évoquer pudiquement le drame familial : l’arrestation de sa mère, de son frère et de sa sœur en juillet 1942, puis leur fuite de cachette en cachette ; la disparition tragique du père de ces enfants à Auschwitz ; sa naissance après-guerre au cœur d’une famille décimée ; la mort prématurée de sa mère et leur survie dans une seule pièce au cœur de Paris.
À cette époque, on préfère honorer les héros de la Résistance et des combats plutôt que de prendre soin de ceux qui sont revenus de l’Horreur. Le silence qui entoure les survivants de la Shoah est oppressant, insupportable. Dans certaines familles, on ne peut plus évoquer le nom de l’Éternel et encore moins son identité de fils ou fille d’Israël. La plupart des personnes Juives que vous rencontrez aujourd’hui sont issues de ce drame absolu. « Consolez, consolez mon peuple ! » nous enjoint l’Éternel, « parlez au cœur de Jérusalem. » Esaïe 40.1-2. Oui, écoutez son histoire et parlez à son cœur.
*Prénom modifié